Voici le témoignage de changement de vie que nous a généreusement fait parvenir Françoise, une lectrice qui a osé changer de vie et qui habite aujourd’hui Phnom Penh, au Cambodge, où elle travaille et mène une vie totalement atypique avec ses deux enfants. Son témoignage illustre bien la force de l’être humain en situation de vents contraires et l’importance de saisir les opportunités. Aussi personnel soit-il, il saura rejoindre ceux et celles qui, aux prises avec des difficultés, rêvent non seulement de s’en sortir, mais de réaliser leurs rêves. (MV)
Cheminement
Je suis née au Nigeria où j’ai vécu 8 ans. Je suis ensuite successivement passée par le Libéria (1 an), le Sénégal (6 ans), la Côte d’Ivoire (1 an) pour finalement atterrir sur la Côte d’Azur pour passer mon bac. L’année du bac, je savais enfin ce que je voulais faire: formatrice export dans le secteur de la cosmétique. Une fois mon BTS cosmétique en poche, je savais aussi que Paris était l’endroit idéal pour réaliser mon rêve.
J’ai donc commencé à postuler dans des entreprises cosmétiques et c’est en répondant à une annonce d’assistante commerciale et formatrice export que j’ai été sélectionnée. Mes amis et ma famille n’arrêtaient pas de me demander si j’étais sûre de mon choix, car je ne connaissais personne à Paris et le climat ainsi que la vie étaient loin d’être ceux de Nice. Mais j’étais déterminée, je savais que c’était le début d’ une nouvelle vie.
Une fois à Paris, mon parcours professionnel et personnel fut effectivement difficile: je travaillais avec une directrice très exigeante, je vivais beaucoup de stress et je devais prendre beaucoup d’initiatives, car il n’y avait personne pour me former et je n’avais pas d’amis. Mais j’aimais ce travail qui me permettait de voyager et d’aller à la rencontre de d’autres lieux et cultures.
Je fis plus tard la connaissance de mon futur mari, avec qui j’ai eu la chance d’avoir deux beaux garçons en santé. En 2007, mon ascension professionnelle était au beau fixe (20% de voyages sur un an, plus de management) et j’ai pu acheter la maison de mes rêves. Tout ce que je voulais, je l’avais obtenu par mon travail, ma volonté, mon courage et ma persévérance.
La descente en enfer
Cette même année, après sept années de mariage, ma vie a basculé en enfer. Mon mari, buveur modéré d’alcool avant que je le connaisse, a commencé à boire de plus en plus, à être de plus en plus agressif verbalement envers mes fils et moi. Puis, un jour de septembre 2009, en rentrant de mon travail, après lui avoir annoncé avec joie que mon patron m’avais promue et augmentée, il m’annonce qu’il ne m’aime plus et veut divorcer… Un vrai choc!
On dit que l’amour rend aveugle et je le confirme à 100%. J’ai essayé de comprendre pourquoi, de changer ce qu’il n’aimait plus où ce qui lui manquait, car je ne voulais pas détruire notre famille sachant que mes fils n’avaient que trois ans et huit ans… Mais rien ne changea, au contraire. Il buvait et s’absentait de plus en plus. Son comportement était tellement à l’opposé de tout ce que j’avais vécu avec lui que j’ai pensé qu’il devait y avoir d’autres raisons… À force de chercher, malgré tous ses dénis, je finis par découvrir le pot au rose. Il avait une maîtresse depuis 2007 et menait donc une double vie depuis cette époque: une femme rencontrée la veille de notre mariage, qui devait aussi se marier, mais qui avait décidé de tout arrêter pour vivre avec mon mari.
Mon mari ne pouvait plus nier et il commença à me harceler moralement pour que je quitte Paris avec mes fils et retourne vivre chez ma mère à Nice. Je sentais mes enfants en danger, en raison de son alcoolisme, de son agressivité verbale et de son harcèlement.
Je peux dire que j’ai tout essayé:
- deux fois une main courante (voir note) au poste de police (où on ne m’a malheureusement pas dit que j’avais le droit de lui retirer la garde pour mise en dangers des enfants sachant qu’il était ivre tous les jours);
- trois psychologues différents: l’une m’a dit que tout était de ma faute, une autre que sa relation allait être une question de mois, et une autre encore m’a dit qu’il fallait que je parte.
- Un psychologue spécialisé avec les enfants pour extérioriser ce que mes fils vivaient au quotidien
Le temps des décisions
Au final, je me sentais désemparée et je ne savais plus si je devais rester ou partir. C’est la prise de conscience que mes fils étaient en danger qui m’a fait prendre mon courage à deux mains et prendre plusieurs décisions. J’ai démissionné de mon poste où je gagnais 3500 euros par mois; j’ai vendu, en période de crise économique, la maison de mes rêves où j’avais tant investi et qui m’appartenait majoritairement; et j’ai fait une croix sur quinze années de vie en région parisienne , tout cela en quatre mois.
Trois semaines avant mon départ sur Nice, mon mari, parti en vacances avec sa maîtresse, a commencé à m’appeler en me disant qu’il n’était pas heureux avec elle, qu’il réalisait qu’il avait fait la plus grosse erreur de sa vie, que j’étais et que je resterais la seule femme qu’il a avait vraiment aimée, qu’il voulait que je reste à Paris… mais comme tout était déjà en action de mon côté, je suis partie en août 2009. Pourtant, étant très famille et pour le bien de mes fils, j’ai néanmoins décidé de lui donner une dernière chance en acceptant qu’il vienne à Nice, à la condition qu’il cesse totalement l’alcool, ce qu’il fit… Mais on ne change pas ainsi la vraie nature des gens!
J’ai aussi rencontré un psychologue de couple, mais au final je pleurais après chaque séance. Je suis restée à Nice avec mon conjoint pendant trois autres années, mais je n’étais pas heureuse, ni personnellement ni professionnellement (chômage pendant 3 ans, la Côte d’Azur étant très convoitée).
https://oserchanger.com/blogue_2/2021/04/20/changer-de-vie/
Changement de vie: réaliser mon rêve
Toutes mes tentatives pour remonter la pente, tant personnellement que professionnellement, se sont terminées par des échecs. Mais avec le recul, je me dis que c’était probablement là des signes me disant que mon avenir n’était pas là…
Le côté positif de mon malheur est que, pendant ces années de galères, j’ai rencontré des tas de personnes formidables qui ont su me soutenir dans mes choix. Je me suis donc décidée à changer de vie pour réaliser un autre de mes rêves: partir vivre à l’étranger avec mes fils .
J’ai commencé par contacter un de mes anciens client, distribuant des produits cosmétiques au Cambodge. Je lui ai demandé s’il connaissait des entreprises intéressées par mon profil et il m’a répondu: Oui, moi. Quatre mois plus tard, je suis partie au Cambodge en repérage pour budgétiser ma future vie et voir si le salaire qu’il me proposait suffirait à subvenir à mes besoins. Il me proposait 2000$ (USD), tout en admettant qu’il me fallait au moins 3000$ (USD) pour vivre normalement – le salaire moyen d’un cambodgien varie entre 150 et 2500$ US.
Un coup du destin
Après deux mois sur place, mon patron à malheureusement fait un AVC et j’ai du prendre les rênes sans personne pour me guider. Du jour au lendemain, je me retrouve à la tête de cent soixante employés Cambodgiens, dont une petite quinzaine seulement parle l’anglais. Je devenais d’un seul coup décisionnaire, dirigeante, responsable du recrutement, signant toutes les dépenses comme s’il s’agissait de ma propre entreprise.
Bien sûr, je suis encore très loin de mon précédent revenu et bien loin aussi de mon niveau de vie français, car mon salaire me permet juste de payer mes besoins quotidiens. Socialement, mon statut de femme séparée avec deux enfants en contrat local est à l’opposé de tous les expats en couple avec enfants. Mais je m’y fais. Heureusement que Skype existe!
Au final, le challenge professionnel et humain est énorme, sans compter tout ce que mes enfants doivent apprendre au quotidien. Le Cambodge est un pays en voie de développement, donc beaucoup de produits de première nécessité manquent. Le passé de ce pays fait qu’il y a beaucoup de lacunes tant au niveau de l’éducation que du travail ou des règles de vies.
S’adapter au changement et y trouver les côtés positifs? C’est ce que nous faisons à chaque jour. Par exemple, nous avons visité les quatre coins de ce magnifique pays et comptons visiter les merveilleux pays voisins que sont le Laos et la Birmanie. Et je considère aujourd’hui cette expérience malheureuse de vie comme un tremplin qui va me permettre de gravir à nouveau mon échelle. Pour employer une image, je peux dire que j’ai chuté à Ground Zéro, mais je commence à remonter la pente et ce n’est que le début!
Tout est possible
J’ai réalisé beaucoup de rêves, je suis montée très haut dans mon échelle, donc je suis forcément capable de recommencer! En conclusion, je pourrais dire: commencez par avoir des rêves bien précis, faites parties d’associations pour ne pas rester seul et essayez de rencontrer des personnes ayant eu des expériences similaires, lisez beaucoup de livres, notamment le livre Oser changer qui m’a aidée à reprendre confiance en moi et à reprendre les rênes de ma vie.
Et surtout, n’oubliez pas que tout est possible, quel que soit votre statut, votre éducation, votre passé, votre expérience. Chacun est acteur de sa vie de par ses choix et ses actes. La suite au prochain numéro car, croyez moi, je ne suis qu’au début de mon ascension et j’ai encore des tas de rêves dans ma tête!
Françoise , Phnom Penh, Cambodge
Note: La main courante est une déclaration par laquelle vous pouvez signaler des événements et les dater. La nature, la date et le lieu des faits sont consignés dans un registre de police ou de gendarmerie. Si les services de police ou de gendarmerie estiment que les faits constituent une infraction, ils en avisent le procureur de la République qui décide des poursuites pénales à donner.