Nous savons tous à quel point il peut souvent être difficile de changer une habitude. Pour changer, il faut accepter de faire des deuils. Ce pourra être le deuil de sa sécurité, de son aisance matérielle, de son estime de soi peut-être pendant un certain temps, de son identité professionnelle, de la reconnaissance, de rapports sociaux, de l’organisation de son temps, de valeurs peut-être… Et surtout, changer, c’est accepter de faire le deuil de comportements qui nous sont habituels. Mais changer une habitude, c’est possible, grâce à la plasticité de notre cerveau.
L’être humain est un être d’habitude
À notre naissance, nous avons très peu d’aptitudes, même si nous avons progressé pendant plusieurs mois dans l’utérus de notre mère. Mais rapidement, nous devenons capable de faire des relations entre des milliers d’objets de notre environnement et notre cerveau se façonne en grande partie grâce à l’environnement dans lequel il baigne. Et très tôt, nous développons des habitudes, qui sont en fait des raccourcis mentaux. Marc-Olivier Vachon, dans son article Innovation et compétence: pas toujours bon ménage parlera de la Loi du Ferré pour expliquer ce phénomène inhérent à la nature humaine qui l’empêche de sortir du confort de ses habitudes.
Cette loi indique que, dans la très grande majorité des cas, notre capacité à innover dans un secteur d’activité est inversement proportionnelle au savoir-faire que nous y avons développé à travers le temps.
Autrement dit, le fait d’être ferré dans un domaine comporte son lot de désavantages, le principal étant notre incapacité à sortir des sentiers battus ou de la voie ferrée, si vous préférez, et d’explorer de nouvelles avenues. Lorsque nous apprenons à exécuter une nouvelle tâche, que ce soit jouer d’un instrument de musique ou compléter un procès-verbal, notre cerveau emmagasine des stratégies cognitives qu’il pourra plus tard répéter de façon semi-automatique, nous permettant ainsi d’étendre graduellement notre maîtrise. (…)
Une habitude: un raccourci mental
Toutes nos interactions avec le monde extérieur puisent constamment dans ces raccourcis mentaux. Dans le cas contraire, nous serions totalement incapables de vaquer à nos occupations les plus simples, ne serait-ce que de lire cet article et de maintenir une position assise.
Pourtant, notre cerveau est construit pour le changement. D’ailleurs, le cerveau de l’être humain d’aujourd’hui est très différent de celui de notre ancêtre du Moyen-Âge. C’est grâce à son immense capacité d‘adaptation que nous sommes si différents les uns des autres. Mais lorsque nous sommes devenus des adultes, nous avons construit dans notre cerveau un vaste répertoire de talents, de capacités et d’habitudes qui sont devenus plus ou moins des automatismes.
De façon métaphorique, nous pourrions dire qu’une habitude, c’est comme un sentier dans la forêt que nous avons emprunté des milliers de fois. Il s’est creusé, s’est dégagé au point de pratiquement devenir une route qu’on emprunte automatiquement, sans même y penser. Neurologiquement, c’est un peu la même chose qui se passe, au point que nous en finissons par croire que l’habitude fait partie de notre nature. Pas étonnant alors que lorsque nous voulons changer de sentier ou que quelqu’un nous propose de nous aventurer à droite ou à gauche, il y ait de la résistance.
Changer une habitude, c’est possible?
Bien sûr, si nous ne croyons pas possible de changer une habitude, si nous croyons qu’elle fait partie de notre nature, il y a fort à parier que nous ne ferons aucun effort pour ce faire. Pourtant, les recherches démontrent que c’est possible.
Actuellement, de nombreux laboratoires étudient la neuroplasticité du cerveau et ses capacités d’apprendre de nouvelles choses et de développer de nouveaux talents, que ce soit dans l’enfance, à l’âge adulte et au troisième âge. Les résultats de leurs recherches démontrent qu’il est possible d’apprendre à tout âge. Mais nous apprenons différemment à l’âge adulte.
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Nos façons d’apprendre changent
Si, quand on est bébé ou enfant, notre cerveau se modèle en recevant l’information sans y prêter attention, de façon quasi involontaire – qu’il suffise de penser à la marche et au développement de sa langue maternelle – à l’âge adulte, le cerveau se modèle suite à une action volontaire. En d’autres termes, cela part d’une décision. Les résultats des recherches scientifiques nous disent que nous sommes en charge, que nous sommes responsables de notre apprentissage, que c’est sous notre contrôle. Elles soutiennent que notre bonheur et notre bien-être, nos talents, nos capacités, nos aptitudes sont capables de modifications constantes, d’améliorations constantes et que nous sommes l’agent de tout cela.
Si, enfant, nous avons facilement appris le français parce que nous baignions dans un univers francophone, il faut qu’à l’âge adulte, si je veux apprendre l’espagnol ou l’anglais, nous le décidions, que nous prenions en main notre apprentissage.
C’est la même chose en ce qui concerne les habitudes. Pour changer une habitude négative, nous devons d’abord comprendre qu’elle nuit à notre quête du bonheur, de la santé, du bien-être. Nous devons aussi être convaincus de l’utilité d’habitudes positives. Nous devons ensuite décider de changer, être déterminés, puis agir encore et encore pour développer de nouvelles connexions dans notre cerveau. Pour creuser un nouveau sentier si vous préférez.
C’est par la pratique que nous avons tous appris à parler et à écrire et que nous réussissons même à déchiffrer le difficile code des émotions et du langage non verbal. C’est aussi par la pratique et la persévérance que l’on apprend de nouveaux comportements et que l’on développe de nouvelles façons de penser plus positives. L’effort est la composante nécessaire à l’acquisition d’un nouveau conditionnement. Pas un discours populaire alors que nous vivons à l’ère de l’instantané, du presse-bouton, de la vitesse, des diètes miracles et de la satisfaction immédiate de nos désirs. Mais un discours plein de promesses.