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La communication

L’écoute: comment bien et mal écouter

Marc Vachon, m.ps.

L’écoute est la grande oubliée de notre société moderne en pleine révolution des communications. (Jean Dion, journaliste) 

Malgré l’évolution phénoménale des moyens de communication, les gens se sentent de plus en plus seuls s’il faut en croire les sondages. On se rencontre de moins en moins pour le simple plaisir d’être ensemble et, même si tout le monde veut des amis, plusieurs hésitent à entrer en contact avec d’autres personnes, soit par peur de les déranger – les autres sont tellement occupés – soit parce qu’ils craignent ce que les autres vont penser s’ils leur font sentir qu’ils ont besoin d’eux, comme si c’était là avouer une sorte de faiblesse.

Pourtant, les recherches le démontrent, la solitude a un impact direct sur la santé et sur la longévité. La probabilité est quatre fois plus grande de devenir malade chez les hommes seuls que chez ceux qui sont moins isolés. Chez les individus atteints par des problèmes cardiaques, la convalescence est plus rapide et les chances de survie plus grandes s’ils vivent avec d’autres ou s’ils ont des personnes à qui se confier (ANDREWS, Cecile (1997) The Circle of Simplicity. Harper Collins Publisher. NewYork. p.7).

D’autres études révèlent que les hommes qui profitent d’un support solide de leur famille, de leur parenté et de leurs amis pendant des temps de crise ont moins de chance de développer des problèmes physiques et mentaux.

Dans un autre domaine, quand on a demandé à un groupe de femmes enceintes si elles se sentaient supportées par leur famille et leurs amis, on s’est rendu compte que 91% des complications sérieuses pendant la grossesse survenaient chez celles qui rapportaient avoir une vie stressante et peu de support social (note 1)

L’écoute et le lien social

Le lien qui nous rattache aux autres paraît donc être une des sources du bien-être physique et émotionnel et, peut-être même du bonheur. Plus de la moitié des canadiens qui se disent très heureux en attribuent l’origine à leurs relations interpersonnelles (relations avec la famille, les enfants, les amis).

L’écoute abusive de la télévision et le surfing sur le Web n’apparaissent pas vraiment dans les critères du bonheur, même si la moyenne d’heures passées devant un écran semble prouver le contraire. En réalité, cela diminue notre capacité à entretenir une bonne conversation. Et comme si ce n’était pas assez, la télévision et ses personnages font paraître notre vie comme étant bien ennuyante, rien pour se remonter le moral.

Mais quel plaisir d’échanger  avec d’autres sur ce qu’on vit, de parler de ses passions, du dernier livre qu’on a lu, de raconter et de rire des finesses de nos enfants et de sentir que notre vis-à-vis nous donne de l’écoute.

Quel soulagement aussi de pouvoir livrer ses craintes, ses inquiétudes, ses espoirs, ses déceptions à une oreille attentive qui prend le temps, sans juger, conseiller ou moraliser, surtout quand on doit vivre des moments plus difficiles.

Il est remarquable d’ailleurs de constater qu’une des premières réactions des personnes soumises à un stress important consiste à rechercher l’aide et l’écoute de la famille et des amis. (voir Se confier. Six critères pour vous aider à bien choisir une personne de confiance)

L’écoute et la communication au travai

Cette communication, qui est souvent prise pour acquise, est aussi une partie importante de la vie au travail. Une bonne communication peut nous aider à améliorer le travail d’équipe, à résoudre efficacement les problèmes, à éviter les conflits et contribue plus que tout à créer un environnement agréable qui favorise à son tour la performance et la productivité.

Dans les périodes de bouleversements, nous avons chacun la responsabilité d’avoir des relations harmonieuses avec les autres. Et plus encore, nous avons la responsabilité d’être à l’écoute de ceux et celles qui éprouvent plus de difficultés.

Cela est vrai pour les pairs, et c’est aussi vrai pour les gestionnaires qui, non seulement doivent communiquer clairement et précisément avec tous les employés, mais qui encore doivent créer un climat d’ouverture et donner de l’écoute. En effet, ceux-ci ont à communiquer des décisions parfois difficiles et qui ont des conséquences importantes sur la vie et le moral des travailleurs.

Mais ils doivent aussi être capables d’écouter adéquatement ces mêmes personnes qui ne manqueront pas de réagir à ces décisions qu’ils n’ont pas toujours souhaitée

7 manières de mal écouter

1- L’écoute s’apprend et se pratique, et nous avons fait un grand pas quand nous prenons conscience des différents comportements qui caractérisent la mauvaise écoute. Comme on vient de le dire, même si on donne non-verbalement tous les signes de l’écoute, par des hochements de tête, en regardant l’autre dans les yeux ou en souriant, il arrive que nos pensées soient ailleurs, bien loin des commentaires que nous faisons semblant d’écouter.

2- On peut aussi écouter en étant sur nos gardes, défensif, comme si les propos de notre interlocuteur nous menaçaient. Les personnes en situation d’autorité sur leur interlocuteur risquent plus souvent que les autres de tomber dans ce piège, prenant comme des attaques personnelles ce qui ne l’est peut-être pas.

3- Un autre travers qui nous guette tous, c’est de vouloir à tout prix exprimer nos idées, n’attendant qu’une occasion pour prendre le contrôle de la conversation. Cette façon, bien humaine par ailleurs, de se mettre de l’avant pour prendre la vedette est très fréquente et cause de très nombreuses interruptions dans les conversations.

4- Dans la même veine, on peut n’écouter que ce qui nous intéresse dans les commentaires de l’autre, que ce qui va dans le sens de nos idées, de nos opinions, éliminant par le fait même tout le reste.

5- On encore, on peut carrément vouloir éviter certains sujets, faisant semblant d’écouter, mais oubliant aussitôt ce qui vient d’être dit. Les adolescents font cela régulièrement quand ils ne veulent pas entendre parler du ménage à faire dans leur chambre. Ils font Oui de la tête, mais ils n’écoutent pas du tout et seront tout étonnés d’apprendre qu’on le leur a demandé dix fois.

6- On peut aussi écouter en cherchant à prendre en défaut notre interlocuteur. On lui pose des questions, ce qui en soit est loin d’être mauvais, donnant plutôt à l’autre l’impression qu’on s’intéresse à lui, mais c’est pour mieux l’attaquer un peu plus loin. La personne s’ouvre, mais, se rendant ainsi vulnérable, elle regrettera amèrement de s’être ainsi confiée et se refermera instantanément comme une huître.

Un avocat m’a dit un jour qu’il était toujours très amical et écoutant avec la partie adverse, mais qu’en ce faisant, il faisait comme celui qui passe la main dans le dos de l’autre pour mieux trouver l’endroit où planter son poignard… Ouch! Fortement à déconseiller, donc, si vous avez à cœur de vraiment comprendre les autres, sous peine de provoquer la méfiance et même le mensonge.

7- On retrouve dans la même catégorie ceux qui portent des jugements sur leur interlocuteur ou qui jouent au mauvais psychologue en posant des diagnostics ou en donnant des interprétations aux comportements ou aux émotions de l’autre.

Comment bien pratiquer l’écoute

Bien sûr que l’écoute sera différente selon votre objectif. Nous nous concentrerons ici sur l’écoute qui a pour but d’aider ou d’apporter du réconfort à une autre personne, et non sur l’écoute informative. Dans les moments difficiles, c’est ce type d’écoute qui est le plus pertinent et efficace.

J’en entends déjà me dire qu’ils sont fatigués d’entendre les autres se plaindre encore et encore des mêmes choses, jour après jour. Cela nous permet tout de suite d’insister sur un point important: pour faire de l’écoute, il faut être disponible, en termes de temps et de disposition d’esprit.

Ne commencez pas d’écoute si vous êtes pressé par un rendez-vous urgent, ou si vous n’acceptez pas de vous engager personnellement.

La reformulation

La forme d’écoute que je vais maintenant vous proposer a fait ses preuves et, si on peut sembler maladroit au début en l’appliquant, elle mérite d’être pratiquée et utilisée. Il s’agit de la reformulation, qui consiste à essayer de comprendre ce que notre interlocuteur veut dire, pour ensuite lui redire la même chose en d’autres mots, sans rien y ajouter.

La reformulation a deux avantages principaux. D’un côté, elle démontre à l’autre que vous faites un effort pour le comprendre, ce qui lui permet de préciser ou de corriger si vous avez mal compris. D’autre part, cela aide la personne écoutée à se situer, à avoir une idée plus claire, plus objective de ce qu’elle veut dire.

Il ne s’agit évidemment pas de reformuler mot à mot, de façon bébête, ce que l’autre dit, mais bien plutôt de redire ce que vous avez compris du message de l’autre, dans vos propres mots. La reformulation peut se faire sur ce que vous saisissez de la pensée de l’autre, mais il peut être très approprié de reformuler les émotions que la personne transmet, consciemment ou non, dans son message.

Cette approche est intéressante à plusieurs titres, en ce qu’elle permet de venir en aide à une personne en difficulté en l’amenant à trouver ses propres réponses, ce qui a beaucoup plus d’impact que de prodiguer des conseils ou de donner nos propres solutions.

La reformulation bien faite favorise également l’ouverture chez l’autre personne. Se sentant écoutée, et non menacée, analysée ou jugée, le climat de confiance se crée et, même si on n’arrive pas à des solutions, cela procure un réconfort et une libération, et permet souvent de court-circuiter la résistance ou les plaintes à n’en plus finir.

En terminant, ne faites pas de reformulation inutilement et gardez cette forme d’écoute pour des problèmes d’une certaine importance. Si quelqu’un vous demande l’heure, n’allez pas lui répondre Si je comprend bien, tu n’as pas de montre… Par contre, je pense qu’il y a suffisamment de situations au travail et dans la vie quotidienne où vous pourrez faire bon usage de cette forme d’écoute et contribuer, à votre façon, à resserrer les liens qui vous unissent avec ceux et celles qui, finalement, sont dans la même barque que vous.

Note 1: CHOPRA, Deepak (1993). Ageless Body, Timeless Mind. Harmony Books. New York. p. 55.

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